Par Loup Folie–Lançon, L3 Géographie sociale et politique
Danielle Faulcon est la responsable du Pôle Prostitution du CEID (le Comité d’Étude et d’Information sur les Drogues et les Addictions). Entourée d’une équipe de professionnels (travailleurs sociaux, juriste, socio-esthéticienne), elle aide les personnes en situation de prostitution à aboutir à une insertion sociale et fait de la prévention auprès des jeunes en Gironde.
Pouvez-vous citer plusieurs actions que votre organisme a récemment mené ?
Tout d’abord, nous menons régulièrement des maraudes afin d’entrer directement en contact avec les personnes qui se prostituent. C’est une initiative importante pour avoir un contact avec elles et eux, montrer ce qu’on fait et qu’il existe une porte de sortie. D’autre part, nous organisons également des journées ciné-débat réservées aux moins de 25 ans avec des jeux de rôles et des débats. Elles permettent de briser le silence dans une communauté où la situation reste délicate à aborder, et de réduire ce qu’on appelle le risque prostitutionnel. Enfin, nous publions plusieurs BD sur nos réseaux sociaux sur des thématiques liées à la sexualité et aux risques prostitutionnels à destination des jeunes.

Votre projet “Je gère” est très actif sur les réseaux sociaux, notamment sur TikTok et Instagram. Pensez-vous qu’Internet garantit une bonne prévention au sujet de la prostitution, ou qu’il permet au contraire un plus grand risque de tomber dans un système de traite ?
Je pense qu’il faut avant tout déconstruire nos représentations auprès d’Internet et des réseaux sociaux : nous nous servons justement de ces outils pour diffuser nos messages de prévention parce que les jeunes y sont les plus actifs. D’un autre côté, il est évident que les réseaux sociaux ont facilité le phénomène : avant, quand on se prostituait, il n’y avait aucune garantie de sécurité car chaque territoire était géré indépendamment. Maintenant, on peut poster une annonce en cinq minutes sur des sites
spéciaux ou des sites de rencontre. Pour évaluer l’ampleur de ce phénomène, nous passions par le site de rencontre Coco pour créer des annonces et évaluer combien de personnes y répondaient, et avec quels types de profils, et on recevait plusieurs dizaines de réponses dès les dix premières minutes. Toutefois, nous n’entrions jamais en contact avec les personnes. Mais il s’agissait d’un outil pour observer les tendances.
Quand on a comme proche une personne en situation de traite à des fins d’exploitation sexuelle, quels sont – pour vous – les bons réflexes à adopter ?
L’écoute active doit être le comportement primordial chez les proches, afin de détecter au plus tôt les premiers signes de mal-être. Ensuite, il faut être présent auprès de l’individu pour garder une certaine confiance, et être capable de l’accompagner dès que possible vers les infrastructures adéquates. Rediriger son proche vers des professionnels qualifiés reste aujourd’hui la meilleure chose à faire, car ce sont eux qui pourront le prendre en charge de manière efficace, et assurer un suivi de sa situation. Ce sont aussi eux qui sont le mieux habilités à accompagner une victime lors d’un dépôt de plainte, parce que ce sont eux qui connaissent le mieux ce milieu et les victimes qu’il engendre.